Auteur: 
MYRIAM RACHMUTH, 3.D5Z, Collège St-Michel

Commentaires de Louis Dietrich: 

Reportons-nous à la très belle carte de 1999. On constatera que le point de vue est le même: le rassemblement de la foule sur la Place de la Cathédrale reste le moment principal de la manifestation. Mais l'intention est différente: tout en gardant le thème d'un peuple en mouvement allant jusqu'à bousculer Saint Nicolas, la jeune artiste focalise en gros plan sur un enfant porté par les épaules de son robuste papa. Cette attitude, typique le long de ce cortège,  évoquera sans doute chez beaucoup d'adultes, le moment où ils ont eu le même vécu dans leur enfance. Les Anciens  de St-Michel viennent parfois de très loin à l'étranger pour que leurs enfants vivent à leur tour ce moment magique où ils se sentent grandis pour un spectacle qui s'adresse particulièrement à eux.

Admirons avec plaisir la qualité de la version 2006, bien à la hauteur de celle des années précédentes.

Signalons donc les plans de lumière sur les bâtiments rendus avec exactitude, l'impression d'une foule en délire, un Saint Nicolas qui, avec peine, force le passage, et ce visage candide d'un enfant dominant la place, distrait un instant par la masse des spectateurs qui tentent de forcer le passage, ou peut-être, admirant un ballon qui monte de la lumière vers la profondeur bleutée de la nuit tombante.



Discours: 

Mes biens chers enfants,

Quelle joie de vous revoir ! Les biscômes, les mandarines, le vin chaud et les marrons commençaient à me manquer… J’étais si pressé que j’ai failli nous précipiter dans la Sarine, mon âne et moi, en voulant traverser déjà le nouveau pont de la Poya ! mais ce qui me réjouit le plus, ce sont vos sourires, mes enfants ! Vos mains tendues et vos yeux pétillants remplissent mon cœur de joie ! Et cela me rend si heureux que je demande à mes pères fouettards d’être plus cléments que d’habitude. Je me sens ici chez moi et j’ai été mieux accueilli que les footballeurs suisses l’an passé dans mon pays d’origine. Hélas, ici aussi, tous les étrangers n’ont malheureusement pas la chance de recevoir un accueil si royal que le mien.

Meine lieben Kinder,

Ich bin so froh, euch endlich wieder zu sehen ! Feststimmung herrscht heute Abend in eurer schönen Stadt ! Und meine Schmutzlis werden deshalb mit euch ausnahmsweise sehr nett sein, meine Kinder !

Comme chaque année, j’ai observé votre monde avcec une grande attention ; autant vous le dire que je ne m’amuse pas tous les jours. Quels bonheur pourtant, ce soir, de vous voir ici tous réunis, Suisse romands und Deutschschweizern ! Car j’ai entendu dire que des larbins du bu-si-ness (il le prononce à la française, un père fouettard le corrige et il rectifie dans un anglais impeccable) euh  « bizness », insensible à vos cultures, voulaient établir l’anglais ultra-utilitaire en seconde langue à la place du français ou de l’allemand. Ces brigands se croient dans le Far-West de «  Calamity George ) et non dans les paisibles prairies de «  Seppi le Dzodzet » !

Was ich sehr wichtig finde, ist eure nationale Einheit und euer gutes Einvernehmen mit den anderen Kulturen dieses schönen Landes ! Sagt allen nein, die gern möchten, dass ich später meine Rede in der Dollarsprache halte. Gebt zu, dass dies peinlich wäre…

De là-haut, j’ai aussi vu que dans le pays des sept sages, il y en a qui triment et d’autres qui engrangent de grosses primes. L’argent récolté à la sueur du front des petits prolétaires se transforme bien souvent en lingots d’or dans les mains froides des grands managers… Saint Pierre en aurait bien besoin pour agrandir les portes du Paradis qui voient défiler tant de monde depuis que George le cow-boy est lui parti chercher de l’or … noir en Irak. Et voilà ce pays toujours noyé dans la violence ! Mais la Paix ne sera pas sauvée par cet injuste

« Busch-à-Busch » …

Et que dire des dépenses militaires pour contrer la haine entre les hommes… Même dans un pays qui se dit « neutre » comme le vôtre ! Malheureusement, les armes aboutissent sans les mains de tireurs impitoyables, plus précis que Barnetta, Streller ou Cabanas !

Ich habe gehört, dass euer kantonaler Sepp dem Bundesrat auf Wiedersehen gesagt hat. Micheline freut sichaber, jetzt mit Doris endlich feministische Begleitung zu haben. Ich bin über die Emanzipation der Frauen sehr glücklich. Jetzt gilt die alte Regel der drei Ks : Kinder, Küche, Kirche endlich nicht mehr !

Aber einige Feministinnen dürfen nicht vergessen, dass ich der Freund von allen Kindern bin, und zwar auch der noch ungeborenen ! Es gibt kein Leben, das sich nicht lohnt, gelebt zu werden. Vergesst diese heiligen Worte nie : « Was ihr dem geringsten meiner Brüder getan habt, das habt ihr mir getan ».

A l’orée de l’été, alors que je préparais mon voyage vers vous, j’ai été soudain entraîné par une marée bleue qui se déversait vers Berlin. Là-bas, j’ai appris que nos amis italiens étaient bien les plus habiles avec le ballon rond. Ils ont réussi un sans faute, sans la moindre Berlusconerie. Mais quelle mauvaise surprise, lorsque l’un de mes pères fouettards, sur un coup de tête, a dû donner une fessée bien méritée à Zizou. Comme quoi, mes enfants, même les plus grands doivent écouter leurs coups de cœur et non leurs coups  de boule !

Bald werde ich mich von euch leider schon verabschieden müssen. Setzt das Fest fort, und geniesst die Mandarinen, den Glühwein und den Lebkuchen ! Aber vergesst die anderen Kinder auf der Welt nicht !

Le moment est déjà venu de vous quitter mes enfants. J’espérais rester plus longtemps, mais la nouvelle loi ne m’accorde l’asile que sur ma cathédrale. Restez sages, et montrez l’exemple à certains de vos parents ! Et ce soir, tout en mangeant vos biscômes et vos mandarines, essayez de penser aux autres enfants sans le monde, qui eux n’ont pas toujours de quoi manger.

Auf Wiedersehen, et à l’années prochaine !

Adieu donc, enfants bénis de mon cœur !

 

Saint-Nicolas 2006 : Aurélien Pasquier / 3.D5z